vendredi 8 juin 2012

EGLISE


CAMEROUN

« C’EST LA VRAIE DICTATURE
QUI S’INSTALLE »,

déclare Mgr Samuel Kleda, Archevêque de Douala

            Dans un interview recueilli par Jacques Eric Andjick, pour le quotidien camerounais « Mutations » du jeudi 7 juin 2012, Mgr  Samuel Kleda, Archevêque de Douala, successeur du Cardinal Tumi, dans la vaste capitale économique du Cameroun, affirme sans ambage : « C’est la vraie dictature qui s’installe, et la justice sociale, on n’en parlera plus jamais. »

         Quelques extraits de l’interview :

         - Le 13 avril dernier, le Cameroun a adopté un nouveau code électoral. Qu’est-ce qu’il vous inspire ?

         - Le nouveau code électoral n’est pas bon, il n’a pas été conçu selon les principes démocratiques…

         - Quels sont les manquements que vous avez décelés dans ce nouveau code ?

         - Il y en a beaucoup. Commençons par noter ceci : presque toutes les propositions faites par les partis politiques de l’opposition et la société civile ont été rejetées… Aujourd’hui, dans un pays qui veut s’engager dans la voie de la croissance économique, le président doit être élu selon les principes démocratiques, pas un vote à un tour, ce qui existe depuis l’indépendance du pays.

         - L’indépendance de Elecam (Ndlr-L’organisme national pour les « Elections au Cameroun ») est, dites-vous, illusoire.

         -Tout à fait, Elecam n’est pas du tout indépendant; il est totalement soumis au Président de la République, qui en nomme les membres : les 18 membres du Conseil Electoral, le Directeur Général et le Directeur Général adjoint. Il peut également mettre fin à leurs fonctions en cas de défaillance et de dysfonctionnement notés, mais lesquels ne sont pas définis (Art.44).Il est évident que le Président de la République ne peut pas nommer des gens qui ne sont pas acquis à sa cause, issus de l’opposition. Elecam n’a pas d’autonomie financière…Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’Elecam n’est pas un organe libre indépendant, capable d’organiser les élections selon des principes démocratiques…

         -Selon les leaders de partis d’opposition qui ont quitté l’hémicycle pendant le vote de ce code, il ne recherche pas le consensus…

         - Je ne suis pas à mon aise lorsqu’on parle de consensus à trouver au sujet du code électoral. Nous savons très bien comment on peut parvenir à un consensus, surtout dans notre pays. Cela peut réfléchir l’intérêt de quelques individus ou de quelques groupes…Les conséquences peuvent être très néfastes pour notre pays…Il est à craindre qu’il n’y ait plus de dialogue entre les membres du parti qui gouverne et les partis d’opposition et la société civile. C’est la vraie dictature qui s’installe, et la justice sociale, on n’en parlera plus jamais. Les maux qui minent notre société camerounaise n’auront jamais de solution…"
                                                                                                    ( A suivre)
LE REGARD DE "MONDEACONSTRUIRE"
         Il nous semble que cette déclaration est une "première". Sauf erreur, nous n'avons pas vu jusqu'ici, la déclaration de "Dictature" prononcée, comme telle, ouvertement, par une personnalité de l'Eglise catholique camerounaise.
         Mgr Kleda montre dans cet intreview qu'il a profondément étudié le texte de Elecam, pour pouvoir y déceler tous les abus qui s'y trouvent diffusés.
         Son analyse serrée de chaque paragraphe devrait déjà pouvoir servir à nombre de prêtres et laïcs engagés pour détecter dans ce document tout ce qui est en contradiction flagrante avec la Pensée Sociale de l'Eglise. Il ne s'agit pas dans une telle situation de voter pour tel parti ou pour tel autre. L'action même des croyants est urgente sur d'autres terrains.
                                            Pierre Jarret





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