TRISTES PRISONS
Pas de lits dans les prisons de Yabassi et Edéa
Les détenus dorment sur des cartons …
La plupart des détenus des prisons
principales de Yabassi et d’Edéa dorment sur des cartons, des planches
ou des nattes. Faute de lits et de matelas, et en violation flagrantes des
règles minima de détention.
Bientôt trente minutes qu’il s’étire dans
tous les sens comme si ses articulations étaient rouillées. Du haut de son
1m80, Boteng Motassi, torse nu, se frotte inlassablement les paupières
recouvertes de chassie pour tenter de repousser le sommeil, tandis que certains
de ses codétenus s’agitent et crient dans la cour de la prison principale de
Yabassi. Après une journée de corvée, la nuit de Boteng a été courte. "Je
dors avec un autre prisonnier sur un morceau de carton. Il faut se retourner
plusieurs fois parce que quand on dort sur un même côté pendant longtemps, le
corps fait mal. Je n’avais pas assez de force pour faire ces mouvements, donc
je n’ai pas vraiment dormi", explique le détenu.
Sur des étagères
Incarcéré à la prison principale d’Edéa,
Hamidou préfèrerait des cartons aux planches, disposées en étagères, sur
lesquelles il est contraint de dormir. Dans ce pénitencier, femmes, adultes, mineurs
passent tous la nuit sur les planches. "Certains les couvrent avec des
nattes ou de vieux matelas pour avoir moins mal. J’aurais aimé posséder
seulement quelques cartons mais il faut tout acheter", indique,
impuissant, Hamidou.
A la prison principale de Yabassi comme à
celle d’Edéa, le constat est le même. En l’absence de lits et de matériels de
couchage appropriés, la plupart des détenus dorment sur des planches, des
morceaux de carton ou des nattes. Selon Ngalani Romuald, le régisseur, ces
matériels sont donnés par des âmes de bonne volonté. "En 2007, une
association féminine nous a fait un don de matelas. Seulement, ils sont tous
aplatis. Mais, nous continuons de les utiliser faute de mieux. Pour le reste,
ce sont les détenus ou leurs familles qui apportent des nattes et des morceaux
de carton", dévoile le régisseur.
Mal de dos
A l’exception des femmes et des personnes
âgées qui disposent d’un lit dans leur cellule, ces mauvaises conditions de
couchage touchent environ cent des cent quinze détenus de cette prison. Au fil
du temps, elles mettent leur santé en péril. "Je ne peux plus aller en
corvée parce que j’ai un mal de dos qui ne me quitte plus. Je prends de temps à
autre des antibiotiques pour le combattre sans succès", raconte un
prisonnier.
Après avoir dormi pendant plusieurs années
sur les planches, Nitti Marceline, 17 ans, traîne des bobos qui l’inquiètent.
"Tout le temps, on se réveille avec les muscles endoloris. On dit
souvent au chef mais on ne nous donne rien. C’est un prêtre qui nous apporte
des médicaments. Même si on se soigne, on sera toujours malade parce qu’on va
revenir dormir au même endroit", s’inquiète la jeune pensionnaire de
la prison principale d’Edéa.
"Traitements inhumains"
Les détenus ne sont pas les seuls à
décrier leurs conditions de couchage déplorables. Les défenseurs des droits de
l’Homme y voient un calvaire inacceptable. "Ce sont des cas de
traitements inhumains et dégradants interdits par les conventions
internationales et les lois nationales notamment la constitution qui, en son
préambule, dit que toute personne a droit à la vie et à l’intégrité physique et
morale ; elle doit être traitée en toute circonstance avec humanité ; en aucun
cas, elle ne peut être soumise à la torture, à des peines ou traitements cruels,
inhumains et dégradants", indique Maître Sterling Minou, avocat au
Barreau du Cameroun.
Conscientes de la gravité de la situation,
les deux administrations pénitentiaires incriminées ont, à leur tour, perdu le
sommeil. Elles relancent régulièrement l’Etat pour demander que chaque détenu
dispose d'un lit individuel et d'une literie individuelle suffisante,
entretenue convenablement et renouvelée de façon à en assurer la propreté,
comme le conseillent les Nations Unies.
Christian Locka (JADE)
Les articles sont produits avec l'aide
financière de l'Union Européenne. Le contenu de ces articles relève de la seule
responsabilité de JADE Cameroun et ne peut en aucun cas être considéré comme
reflétant la position de l'union Européenne.
LE REGARD DE « MONDEACONSTRUIRE »
L’association JADE envoie depuis des
années, ses journalistes constater la
situation des prisons. Celles du Cameroun, comme celles de nombreux pays, laissent beaucoup à désirer. Il faut saluer la
vocation de ces femmes et de ces hommes qui parcourent ainsi les continents.
Le souci des prisons n’est pas en général
très fort chez les responsables « politiques ».
JADE aura eu cette préoccupation de faire
connaître la réalité en ce moment de l’Histoire camerounaise.
Il y aura toujours des personnes
soucieuses des Droits de toute personne humaine. Les chrétiens rappelleront à l’occasion,
avec Jean Paul II, Benoît XVI et tant d’autres, que ces « Droits de l’homme » sont
bien aussi les « Droits de Jésus-Christ » (Mt 25, 40)
Notre reconnaissance à JADE pour ses
visites régulières dans les lieux de détention.
Pierre JARRET
______________
Etienne TASSE
JADE (Journalistes en Afrique pour le Développement) Cameroun
Syfia International
BP 3053 Douala Cameroun
Tel. : (237) 79 85 05 56 / 77 78 59 70
www.jade
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